La banque est l’un des piliers du marché immobilier : sans financement, pas d’achat immobilier. Pour autant, l’offre proposée par les services bancaires autour de l’immobilier reste limitée : crédit, assurances et immobilier de placement principalement. Les services autour de l’immobilier direct, qui représente plus des deux tiers du patrimoine de nombreux foyers français, constituent donc un levier à fort potentiel que les banques ont tout intérêt à exploiter en se positionnant comme tiers de confiance.
Des taux de crédit immobiliers écrasés par la concurrence et un cadre légal plus restrictif.
Les banques françaises se sont adaptées aux évolutions de la gestion du patrimoine de leurs clients en optant pour la digitalisation de leur expérience, investissant notamment dans les applications et l’agrégation bancaire. Le secteur gagnerait toutefois à également placer l’immobilier au cœur de l’expérience client pour trouver de nouveaux leviers de croissance à l’heure où les marges dégagées sur l’octroi de crédit immobilier s’essoufflent.
En effet, l’offre de crédit immobilier, produit d’appel historique, souffre d’une concurrence acharnée qui force les banques à proposer des taux qui restent historiquement bas, et ce malgré la remontée récente, à 1.68% en moyenne en juillet 2022 contre près de 4% en 2012. L’effet de cette baisse des taux se fait particulièrement ressentir sur les marges que réalisent les banques. Négligeables, celles-ci ne font plus du simple prêt immobilier une source de revenu pérenne, d’autant plus dans un contexte inflationniste qui rend de plus en plus souvent négatifs les taux réels et les marges des banques sur cette offre.
Enfin, les récentes évolutions réglementaires renforcent encore les contraintes sur la distribution des crédits. En septembre dernier, les limitations de la durée des prêts immobiliers à 25 ans ainsi que de la part des revenus consacrée au remboursement du crédit et au paiement de l’assurance-emprunteur à 35 %, qui n’étaient jusque-là que des recommandations, ont été rendues contraignantes par le Haut Conseil de Stabilité Financière (HCSF).
Le conseil et les services immobiliers pour passer d’une posture réactive à une posture proactive et restaurer les marges perdues.
Le contexte de forte concurrence sur les taux, notamment celle provoquée par les courtiers immobiliers, rend de plus en plus inefficace le prêt immobilier comme canal d’acquisition de nouveaux clients. Pire encore, cette compétition fait du financement d’un nouveau bien un moment à haut risque d’infidélité de la part des clients existants qui menacent alors de partir à la concurrence pour des taux plus attractifs. Pour rester compétitives sur les taux, les banques sont contraintes de compresser leur marge pour limiter l’attrition de leur portefeuille client.
Pour reprendre le contrôle de la situation, les banques françaises doivent sortir de la position réactive dans laquelle elles sont piégées. En effet, le banquier apprend généralement l'existence du projet immobilier entre 6 et 12 mois après la naissance de ce dernier. Un délai qui place les banques dans une position de négociation très inconfortable face aux clients qui ont pu comparer toutes les offres proposées par les courtiers en immobiliers et autres concurrents.
Les banques auraient fort à gagner en se positionnant bien plus tôt comme tiers de confiance des clients sur le sujet immobilier. Intégrer le conseil immobilier au parcours client et aux applications bancaires placerait les banques dans une position idéale pour détecter et anticiper les projets de leurs clients en amont et les accompagner sur la vente et l’acquisition.
Celles-ci passeraient ainsi à une posture bien plus proactive vis-à-vis de leurs clients.Par exemple, en poussant les annonces correspondant aux souhaits des potentiels acquéreurs (jardin, terrasse, proximité d’une école etc..) ou bien en proposant aux propriétaires, un suivi de la valeur de leur(s) bien(s), des informations sur le marché actuel (i.e. nouveaux permis de construire, évolution des prix) pour leur fournir une meilleure compréhension de l’évolution de leur patrimoine immobilier. Des pratiques déjà très répandues chez nos voisins européens qui constituent un moyen efficace pour détecter et anticiper ces moments de vie clés, Crédit Suisse étant le dernier exemple ambitieux en date.
Détecter les projets en amont pour transformer les risques en opportunités
De par leurs activités, les banques bénéficient d’une expertise unique sur les comportements de consommation et d’investissement des ménages. En associant celle-ci a un suivi du marché immobilier, les banques se trouveront dans une position idéale pour être force de conseil sur les projets immobiliers de ces derniers.
Le grand enjeu des banques sera d’être capable de détecter au plus tôt les projets immobiliers de leurs clients (vente, achat, rénovation) pour être les premières à se positionner auprès d’eux avec des propositions et informations pertinentes. Ce qui leur permettra de sécuriser en amont le financement à venir, ou d’augmenter le volume d’actifs sous gestion en captant les liquidités générées par une vente, voire de prendre part à la transaction. Certains acteurs français se positionnent déjà, à l’instar du Crédit Agricole qui a annoncé la création d’agences immobilières au sein des agences. Ce n’est qu’un premier pas, et il laisse présager pour les années à venir une forte convergence entre les activités du financement et de la transaction immobilière.